Élections, incertitude législative : une loi de finances peut-elle augmenter la fiscalité en cours d’année ?

Nous pensons généralement que la fiscalité applicable est celle en vigueur lors de la réalisation de l’évènement qui génère l’imposition.  C’est parfois vrai. C’est souvent faux.

Pour l’impôt sur les revenus et sur les bénéfices (BA, BIC, BNC), la fiscalité n’est définitivement fixée qu’au 31 décembre de l’année de l’opération. Une loi de finances adoptée en cours d’année peut impacter ces revenus et bénéfices de toute l’année en cours : on parle ici d’une « petite rétroactivité ».

Il n’est donc pas possible de connaître avec certitude la fiscalité applicable aux revenus et bénéfices perçus en 2024 avant le 31 décembre 2024. Cela concerne de nombreuses catégories de revenus, tels les salaires, pensions de retraite, dividendes, plus-values sur titres, revenus fonciers, BIC, etc.. Même le taux des prélèvements sociaux sur revenus du patrimoine ou encore la CEHR (contribution exceptionnelle sur les hauts revenus) pourraient être modifiés.

Le PFU (prélèvement forfaitaire unique) applicable aux revenus de capitaux mobiliers ou aux plus-values sur titres n’est qu’un acompte. Par exemple, pour ceux qui souhaitent percevoir des dividendes d’une société, il semble plus judicieux d’attendre la fin de l’année. En effet, la lecture du projet de loi de finances 2025 applicable aux revenus 2024 peut donner des indications précieuses. Pour mémoire, l’ultime projet de loi de finances est présenté fin septembre par le gouvernement, puis débattu au Parlement (Assemblée nationale et Sénat), avant une adoption définitive en fin d’année et une promulgation avant le 31 décembre.

Cas particulier des prélèvements forfaitaires libératoires
Les rachats de contrats d’assurance-vie issus de primes versées avant le 27 septembre 2017 peuvent bénéficier, sur option, du prélèvement forfaitaire libératoire (PFL) sur les intérêts retirés. Ce prélèvement est libératoire : le contribuable s’acquitte définitivement de l’impôt. Une modification de la loi après la date de rachat n’impactera donc pas sa fiscalité.

D’autres impositions sont plus « définitives ». Par exemple, en cas de vente d’un immeuble (plus-value immobilière des particuliers), le fait générateur de l’impôt se situe au jour de la vente. Ainsi, un changement de fiscalité ultérieur n’impactera pas l’imposition déjà acquittée.

Cependant, ces plus-values immobilières, de même que les intérêts soumis à prélèvement libératoire, sont pris en compte pour le calcul de la CEHR de l’année (établit selon les règles en vigueur au 31 décembre). Une nouvelle « couche » d’imposition pourrait donc encore s’appliquer à ces gains.

Concernant l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), le fait générateur se situe au 1er janvier. Ainsi, pour l’IFI 2024, ce sont les règles du 1er janvier 2024 qui s’appliquent. Un changement de fiscalité en 2024 semble donc exclu. Cependant, en 2012, une contribution exceptionnelle sur la fortune avait été mise en place en fin d’année et avait bien eu pour effet d’augmenter, au global, le montant de l’ISF 2012. Une règle similaire pourrait s’appliquer pour l’IFI 2024.

Heureusement pour les personnes concernées, cette « petite rétroactivité » ne s’applique pas en matière de droit de donation et succession (droit de mutation à titre gratuit) ; l’imposition reste celle en vigueur au jour de la transmission.

Brève financière